Ce n’est pas un hasard si vous pensez déjà avoir lu un article à propos du Nouvel Angyo Onshi sur SoulofMangaFr car j’avais effectivement écrit un article au tout début du blog. Sauf que cet article ne lui rend absolument pas justice et pour cause : c’est un putain de torchon dégueulasse dont je n’ose même pas vous infliger la vue. Surtout qu’à l’époque, on m’avait prêté les 10 premiers tomes sans jamais me passer la suite et il aura fallu plus d’un an pour que je me décide enfin à acheter l’intégral et encore quelques mois de plus pour que j’ose rouvrir le premier tome. Dans mes souvenirs, j’avais adoré et je le considérais comme l’un des meilleurs manga que j’ai lu jusqu’à présent ! Est-ce encore le cas maintenant ?
Le Nouvel Angyo Onshi fut publié dans le magazine de prépublication japonais « Sunday GX » par un duo de mangaka Coréens : Youn in Wan au scénario et Yang Kyung-Il au dessin. Il est intéressant de constater que Youn in Wan travaillera quasi exclusivement avec Yang Kyun-Il tandis que ce dernier collaborera par la suite avec d’autres scénaristes. C’est d’ailleurs Yang Kyun-Il qui est au dessin du récent Area D que je ne connais que de nom. Malheureusement, Le Nouvel Angyo Onshi est la seule oeuvre que j’ai lu des deux mangaka pour le moment et il semble que ce soit resté leur oeuvre majeure.
En France, c’est Pika Editions qui se chargera de publier les 17 tomes de Mai 2003 à Juillet 2008. Le Nouvel Angyo Onshi bénéficiera également d’une édition double à partir de 2012 dont les couvertures sont inédites. Malheureusement inédit ne rime pas forcément avec joli et nous sommes très loin de la beauté des couvertures de l’édition classique. A la place, ceux sont des couvertures bien plus basiques avec une base visuelle identique dont seul change une image dans un petit oval verticale.
Entre Folklore Coréen/Japonais et Fantastique
L’ambiance générale est instauré dès les premières pages du tout premier tome qui nous place juste après la chute du Royaume de Jushin qui entraîne des abus de la part des Gouverneurs corrompus se permettant maintenant d’être cruels au grand jour alors qu’avant il existait les Angyo Onshi qui étaient des représentants de l’empereur, sorte d’agents secrets voyageant incognito à travers le pays pour punir les gouverneurs corrompus et secourir le peuple. Les taxes augmentent drastiquement et les villageois de tout le pays souffrent en silence devant les abus des différentes milices et armées aux ordres des Gouverneurs. L’univers est sombre à souhait entre les viols qu’on ne montrera pas mais qu’on évoquera implicitement, les meurtres ou encore les exécutions sommaires. Malheureusement les fameux Angyo Onshi ont tous disparus en même temps que la chute du Royaume, enfin ce n’est pas tout à fait vrai puisqu’il en reste encore un qui erre à travers le pays.
Là ou le Nouvel Angyo est encore plus intéressant, c’est qu’il s’inspire librement du Folklore Coréen et Japonais. Les Angyo Onshi ne sont pas une pure invention et ont réellement existé à une certaine époque en Corée ainsi que dans plusieurs légendes d’autres pays ! Ils étaient les seuls autorisés à porter des armes à feu et voir des bandits en posséder alors que c’est interdit renforce l’impression d’un pays à l’agonie dont les règles ne sont plus du tout respectés et ou la contrebande prend une place de plus en plus importante. L’histoire des personnages ou certaines histoires au sein même du Nouvel Angyo Onshi sont toujours plus ou moins en rapport avec une ou plusieurs vieilles légendes adaptés à leur sauce même si parfois ils changeant une grande partie de la légende tout en essayant de garder le sens de la dite légende.
Autant dire que pour celui qui ne connaît pas ces vieilles légendes (comme moi), ce n’est pas évident du tout mais ils ont pensés à tout en proposant des pages intitulées « Un peu de culture avec le Nouvel Angyo Onshi » présentes en plusieurs exemplaires dans chaque tome après une histoire en rapport. C’est parfois assez lourd à lire mais la somme d’informations à propos des diverses légendes et cultures est vraiment intéressante et mérite qu’on s’y attarde rien que pour élargir ses connaissances. On se rend compte que certaines oeuvres réussissent à utiliser et adapter avec brio un folklore qu’on n’aurait même pas soupçonner ! L’adaptation des contes et autres légendes est tout simplement magnifique et dessert à merveille l’histoire !
Les premiers tomes du Nouvel Angyo Onshi sont une succession de petites histoires incroyablement prenantes à travers différents endroits du Royaume que parcourt Mun-sue, notre dernier Angyo Onshi. On dirait presque une sorte de road-trip mais en plus sanglant et cinglant ! Le but de Mun-Sue ainsi que son passé restent troubles au début pour petit à petit s’éclaircir mais il faut quand même attendre pas mal de tomes avant d’en savoir réellement plus. Pour le moment, Mun-Sue erre sans réel but mais va quand même remplir ses obligations alors que le Royaume n’existe plus et que rien ne l’y force !
Au cours de son voyage, il va rencontrer diverses personnes aux destins tous plus ou moins différents et tragiques qui pour certains feront partie de ses compagnons de route, la base de construction de l’histoire dans un manga. Ce n’est que bien plus tard que le véritable objectif de Mun-Sue se dévoile et ce n’est pas vraiment un spoil : le pays a sombré, l’empire s’est effondré et tout cela serait de la faute d’un homme que Mun-Sue semble haïr au plus au point et c’est pour ça qu’il erre à travers le pays, à la recherche de cet homme.
Le personnage décrit comme le méchant suprême du manga s’appelle Ajite et il est au moins aussi atypique que Mun-Sue. Il lui arrive même d’aider parfois les compagnons ainsi que Mun-Sue lui même sans qu’ils le sachent véritablement. C’est un personnage intriguant que Mun-Sue décrit comme « le mal incarné » et rien que le fait d’entendre son nom le rend presque fou de rage alors que tout le long du manga, Ajite apparaît comme une sorte de philosophe, un personnage tranquille au demeurant qui réserve bien des surprises ! Mun-Sue l’accuse également d’être la véritable cause de la chute du Royaume.
Une histoire sublimée par le dessin
Le Nouvel Angyo Onshi est un manga qui a maintenant plus de 10 ans et pourtant le dessin n’a pas à rougir de certaines oeuvres actuelles. Parfois le dessin est un peu baveux sur certaines planches (à cause de l’impression ?!) et il arrive même que certaines scènes d’actions soient assez brouillons dans leur déroulement, rendant leur déchiffrage plutôt difficile mais il faut avouer que c’est assez rare. Les doubles pages sont quand à elles magnifiques, à couper le souffle tellement on sent que le dessinateur y a mis tout son coeur et qu’il aime ce qu’il fait.
On constatera également l’amélioration du dessin au fil des tomes, surtout dans les derniers ou le jeu des différentes nuances de noir s’intensifie rendant le dessin tout simplement divin. Et comme si ça ne suffisait pas, le dessin réussit à insuffler un côté spirituel caractérisant l’oeuvre à merveille ! Nous avons également droit à plusieurs illustrations et croquis à chaque fin de tome et je dois avouer que je suis totalement fan du charadesign et du dessin en général.
Mun-sue est un personne pas comme les autres qu’on adore !
Mun-sue un est un personnage totalement atypique, il est sensé incarné la justice en tant qu’Angyo Onshi et pourtant ce n’est pas l’impression qu’il donne. Mun Sue n’éprouve aucune compassion à l’égard des gens qu’il sauve, il agit uniquement en fonction du bien et du mal suite à une promesse qu’il aurait faite à un ami qui lui croyait véritablement en la justice. Mun-Sue paraît désabusé et ne croit plus à la justice, il agit uniquement pour débarrasser le pays de tous les pourris. Il n’a pas peur de dire ce qu’il pense, c’est un homme cynique, froid par moment et fin calculateur. Il ne se gêne pas pour dire aux opprimés de se défendre eux même en devenant plus forts. C’est un connard gentil dont la cruauté n’a d’égal que sa pitié, parce que sous ses airs de mauvaise personne, il sauve quand même les gens et utilise toujours la même phrase un peu à l’instar d’une tsundere : « Ce qui va se passer n’est que le fruit du hasard, n’espérez pas que ça se reproduise un jour ! »
Il existe 3 niveaux d’Angyo Onshi qui sont reconnaissables grâce à leur médaillon appelés « Mahai » en fonction du nombre de chevaux présents sur celui-ci. Au plus le nombre est grand, au plus la puissante est grande. Mais ce serait trop beau si notre héros n’avait pas un énorme point faible, il est atteint d’une malédiction qui par moment le fait s’étouffer et le force à utiliser son inhalateur afin de contrer les effets. La malédiction est d’ailleurs expliqué dans un des tomes relatant le passé de Mun-sue et il faut avouer que c’est vraiment très bien introduit, classe et permet surtout de ne pas avoir un protagoniste trop puissant, invincible. Mun-sue est également fourbe, il n’hésite pas à employer de vils tactiques pour parvenir à ses fins comme utiliser un cadavre en tant que bouclier tout en utiliser armes à feux et autres joyeusetés à base d’explosifs dont il raffole.
Même ses acolytes qui le suivent auront beaucoup de mal à cerner le personnage tellement il est parfois détestable. Une jeune femme du nom de Chun-Y Ang deviendra son Sando, une sorte de protecteur et garde du corps d’Angyo Onshi avec qui il entretiendra une relation assez spéciale car il ne souhaite pas qu’elle le gêne et lui ordonne de n’apparaître que quand il l’appelle. Il va même jusqu’à être vraiment brutal mentalement avec elle, renforçant une fois de plus cet aspect du héros atypique et pas totalement gentillet. De son côté, Sando est un personnage qui n’a plus rien à perdre, qui a connu l’amour ainsi que le désespoir. Elle n’est plus qu’une coquille presque vide qui souhaite juste servir son maître du mieux qu’elle peut. Son introduction est terrible et chacune de ses apparitions mise en scène me fait convulser de plaisir, rien que ça.
Une oeuvre sans défaut et du bon flashback, parole de fanboy !
Il est possible que je sois aveuglé par mon côté fanboy absolu du Nouvel Angyo au point de ne pas lui voir de défaut mais en poussant le vice, il y a bel et bien un point négatif que je ne saurais attribuer à l’oeuvre en elle même ou à la traduction même si cette dernière me semble être responsable. Une bonne partie des phrases négatives ne contiennent pas la particule « ne » et c’est franchement horrible pendant la lecture, à croire que le traducteur le fait exprès ou qu’il y a une raison cachée comme la place dans les bulles mais c’est une chose dont j’ai horreur et en plus c’est une grosse faute de français.
Les Flashback dans le Nouvel Angyo Onshi sont amenés de façon très fluide et naturelle dans la continuité de l’histoire, pas comme dans certains manga qui insèrent ça comme des gros bourrins un peu partout sans aucune cohérence ou presque. Il y a surtout un énorme flashback qui s’étale sur plusieurs tomes à partir d’un certain moment. Il nous propulse dans le passé plutôt trouble de Mun-Sue, ce qui est une bonne chose car j’en devenais presque frustré de ne pas en savoir plus sur Mun-Sue et je pensais que ça ne serait pas forcément traité, laissant place à l’interprétation personnelle ou au mystère. A l’époque je n’avais pu lire que les 9 premiers tomes et je dois avouer que je suis agréablement surpris par la tournure des événements ainsi que les révélations qui sont terriblement intéressantes.
Toutes les bonnes choses ont une fin !
Haletant jusqu’à la fin, j’ai quand même eu parfois un petit peu de mal à suivre certains pans de l’histoire m’obligeant à relire plusieurs fois certains passages. Par contre, je ne suis pas du tout déçu de la fin qui est tout simplement bonne. L’humour est présent avec plus ou moins de subtilité et reste pas mal du tout, surtout qu’il ne prend pas le dessus sur l’histoire en elle même et en parlant d’humour, je vous conseille de lire la rubrique « le mot de l’auteur » qui est vachement intéressante à lire car les auteurs y racontent leur arrivée au Japon, leurs soucis, ce qu’ils ont aimés et c’est assez drôle !
En fin de compte, 17 tomes c’est quand même assez peu vu l’histoire du Nouvel Angyo Onshi et je dois avouer que j’aurais bien lu quelques tomes supplémentaires mais en ce moment, c’est le fan qui parle même si j’ai l’impression que l’histoire est passé du coq à l’âne à partir d’un certain moment ou tout d’un coup l’histoire principale s’emballe et enchaîne à une vitesse phénoménale. J’ai découvert « le monde du manga » avec le Nouvel Angyo Onshi qui reste un de mes manga préférés à ce jour, certes il n’est pas parfait et on pourrait peut être trouver des choses à redire mais putain ce que c’était bon.
Posté le 5 novembre 2015 à 13:50 par freedommanercomments powered by Disqus